Page:Rouleau - Légendes canadiennes tome I, 1930.djvu/92

Cette page a été validée par deux contributeurs.

hiverner ; je n’avais pas de place convenable. Comment faire ? Je ne pouvais me décider à les vendre, car mes poules pondaient dru comme mouches. Je formais mille projets et je les rejetais aussitôt par mon seul vote. Dans mon esprit, il n’y a que le parti ministériel, la gauche ou la loyale opposition (quelle affreuse accolade : loyale et opposition !) n’existe pas. J’étais encore à réfléchir sur le parti que je devais prendre, lorsque quelqu’un frappe à ma porte. Je m’empresse d’ouvrir ; c’est un brave habitant de Charlesbourg. Après les saluts d’usage, mon visiteur nocturne me fait connaître le but de son voyage.

« — Est-ce que vous n’auriez pas par hasard, me dit-il, un Petit Albert en votre possession ?

« — Certainement, répondis-je.

« — Ça vous gênerait-il de me le prêter pour une journée ou deux ? Voici pourquoi : depuis une quinzaine, nous voyons dans la cave de ma maison un fife follette (feu follet) qui apparaît tous les soirs et à la même heure. La femme et les enfants en ont tellement peur, qu’ils ne veulent plus descendre dans la cave, même pendant le jour. Avec votre Petit Albert, j’apprendrai le moyen de le chasser.

« — Vous n’avez pas besoin du Petit Albert pour vous débarrasser de ce feu follet. Je puis faire la besogne moi-même, si vous le désirez.

« — Ah ! que vous êtes bon, monsieur ; je vous paierai comme il faut, si vous faites ce que vous dites.