Page:Rouger - Chants et Poèmes, 1895.djvu/12

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Et nous en bas, quand tu descends, claire et glacée,
Quand tu descends à nous du sommet des grands monts,
Nous élevons vers toi notre obscure pensée :
Car notre âme est ta sœur, ô Lune, et nous t’aimons.


Le soleil éclatant pèse à nos fronts débiles ;
Mais ta flamme est légère et ton sourire est doux,
Et nous allons à toi dans tes muets asiles :
Car notre âme est ta sœur et le soir est en nous.


Plus de cri douloureux ni de rire à nos lèvres !
Plus de désir en nous ravivant la chaleur !
Notre bouche a des mots mystérieux et mièvres,
Nos yeux ont un sourire appesanti d’un pleur ;


Et, dans l’ombre embaumée où tu viens triste et tendre,
Notre front caressé se repose et s’endort,
En rêvant sous tes yeux d’un lit calme où s’étendre ;
Notre front se repose en rêvant à la mort.


Oh ! descends, glisse en nous, pâle esprit de la Lune !
Éteins le mauvais feu sous ta sainte pâleur !
Emporte au loin les bruits de la vie importune ;
Emporte au loin la gaité folle et la douleur !