Page:Roucher - Les mois, poëme en douze chants, Tome II, 1779.djvu/287

Cette page n’a pas encore été corrigée

Et dardant ses fureurs jusques au sein des mers,
Autour d’elle, en rochers, durcit les flots amers.
Assis au gouvernail, sans force, sans haleine,
L’oeil fixé tristement sur l’inégale plaine,
Le couple fraternel voit la mort s’approcher :
Il se lève. à son chef il la veut reprocher.
Impuissant désespoir ! Leur langue embarrassée
Sent mourir la parole à peine commencée.
Veulent-ils s’avancer ? Leurs pieds sont engourdis.
Étendent-ils leurs bras ? Leurs bras restent roidis.
Tout l’équipage expire : et chacun, par la glace
En marbre transformé, debout, garde sa place.
Ces climats, il est vrai, par le nord dévastés,
Ainsi que leurs horreurs, ont aussi leurs beautés.
Dans les champs, où l’Yrtis a creusé son rivage,
Où le russe vieillit et meurt dans l’esclavage,
D’éternelles forêts s’allongent dans les airs.
Le jai, souple roseau de ces vastes déserts,
S’incline, en se jouant sur les eaux qu’il domine ;
Fière de sa blancheur, là, s’égare l’hermine ;
La marthe s’y revêt d’un noir éblouissant ;
Le daim, sur