Page:Roucher - Les mois, poëme en douze chants, Tome I, 1779.djvu/41

Cette page n’a pas encore été corrigée

Mille bouches de bronze à la fois ont tonné.
Tout s’ébranle : le plomb que le salpêtre embrase,
Tombe en grêle de feu sur les rangs qu’il écrase :
Et des troncs mutilés, et des membres épars,
Dans les champs de Cérès volent de toutes parts.
Déjà le feu se tait : le glaive lui succède.
Les deux partis rompus que la fureur possède,
L’un vers l’autre élancés, de plus près combattans,
Se croisent, et de meurtre à l’envi dégoutans,
Aveugles, effrénés, s’exterminent en foule.
Le vaincu mord la poudre, et le vainqueur le foule.
De la gloire à l’instant le fantôme imposteur
Proclame les forfaits de ce jour destructeur,
Promet à des brigands un beau nom dans l’histoire,
Et faisant le ciel même auteur de leur victoire,
Sur les corps entassés dont regorgent ces lieux,
Force leur bouche impie à rendre grace aux dieux.
Taisez-vous, assassins : ces hymnes, ces cantiques,
Ces drapeaux appendus sous nos sacrés portiques,