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Ces heures de fraicheur, où ma muse promène
À travers la prairie et les sillons dorés
Ses pensers, et ses pas doucement égarés.
Combien plaît à mes sens ce zéphyr qui voltige,
Les suaves parfums qu’exhale chaque tige,
Et ce soleil mourant, dont les obliques feux
Glissent sous la verdure en rézeau lumineux !
Que j’aime à respirer l’air pur de ces fontaines,
Où s’agitent sur moi des ombres incertaines !
Mais que dis-je ? En perçant dans ce bois retiré,
D’un cruel souvenir mon coeur est déchiré.
Je chantois au printems, sous ce même feuillage,
Myrthé fidèle alors, et maintenant volage.
Témoins de mon bonheur, solitaires ormeaux,
Que votre douce paix fasse trève à mes maux :
Si vous embellissiez les jours de mon ivresse,
Vous devez aujourd’hui consoler ma tristesse.
Assiégé d’importuns, leur dérobant mes pleurs,
J’ai besoin d’un ami qui plaigne mes douleurs ;
Soyez les confidens de mon inquiétude :
L’amour infortuné cherche la solitude.