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Poëte voyageur, franchir ces hauts sommets,
Ces Alpes, vieux remparts de la belle Ausonie,
Si je puis voir les champs qu’illustra ton génie,
J’irai, j’en fais le voeu, j’irai vers ce tombeau,
Où sa muse, en pleurant, éteignit son flambeau.
Dans ce temple sacré tu me verras descendre ;
En redisant tes vers, je baiserai ta cendre ;
Et ton ombre, peut-être offerte à mon regard,
Instruira ma jeunesse aux secrets de ton art.
Plein de ce doux espoir, qui soutient mon courage,
Loin de toi cependant je poursuis mon ouvrage.
J’entends de nos bergers le cri tumultueux :
Il m’appelle au détour d’un sentier tortueux,
Qui de saules couvert, et tapissé de mousse,
Descend dans un bassin par une pente douce.
Là, pressés par les chiens, les troupeaux fugitifs
Se plongent, en poussant des bêlemens plaintifs ;
Ils nagent en tumulte et le crytal humide
Épure les habits de la race timide.
Elle attend pour sortir le signal du pasteur.