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Le long de ce ruisseau, que l’églantier décore,
Je promène mes pas de détour en détour ;
Je le vois se cacher, se montrer tour à tour :
Je descends avec lui dans la vallée ombreuse,
Agreste labyrinthe, où ma voix amoureuse
A soupiré jadis mes plaisirs, mes tourmens.
Ce lieu réveille en moi de trop chers sentimens,
Et par dégrés, au sein de la mélancolie,
Mon ame doucement tombe, rêve et s’oublie.
Quand frappé tout-à-coup d’une éclatante voix
J’écoute, et reconnois l’Orphée ami des bois,
Le tendre oiseau, caché sous un taillis sauvage,
De ses tons variés animant le rivage,
Traîne tantôt sa voix en soupirs languissans,
Tantôt la précipite en rapides accens,
La coupe quelquefois d’un gracieux silence,
Et plus brillant encor, la roule et la balance.
Vingt fois renaît le jour dans l’orient vermeil,
Tandis que cet oiseau refusant le sommeil,
S’obstine à célébrer son amoureuse histoire :
Hélas ! Il ne fait pas que ses chants de victoire
Avancent à la fois et présagent sa