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Qui des feux les plus vifs a semé sa carrière :
C’est aujourd’hui qu’aux champs par la pluie humectés,
Je vais revoir son front resplendir de clartés.
Un nuage, chargé de cette eau salutaire
Que le taureau prodigue à la soif de la terre,
S’élève, s’épaissit ; et du soleil naissant
Tandis qu’il fait pâlir le disque éblouissant,
Le zéphyr, qui des bois agitoit la ramure,
Tout-à coup de son vol assoupit le murmure ;
Il se tait : avec lui les airs semblent dormir.
Le feuillage du tremble a cessé de frémir.
Les flots sont déridés. D’un meuglement sauvage,
Le boeuf n’attriste point les échos du rivage,
Et l’arbre n’entend plus de sons mélodieux.
L’homme au milieu des champs lève un front radieux :
L’ame ouverte à l’espoir, il jouit en idée
Des plaisirs et des biens que versera l’ondée.
Elle a percé la nue ; elle coule : un doux bruit
À peine dans les bois de sa chûte m’instruit :
À peine goutte-à-goutte humectant le feuillage,
Laisse-t-elle à mes yeux soupçonner son passage.