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Ils sont là, dans l’ombre, qui riment,
Qui peinent sur leurs œuvres, — mais
C’est pour eux seulement qu’ils triment…
Et vous ne les voyez jamais !

Vous ne savez pas l’existence
De tous ces humbles faiseurs d’art
A qui manque la circonstance ;
Mais lorsque, par un pur hasard,

La lueur de gloire est tombée
Sur un petit groupe d’entre eux,
Vous les admirez bouche bée
Ceux-là qui furent plus heureux !

Car ils sont comme la poussière
Des petits atomes danseurs
Qu’on ne voit que dans la lumière,
Les poètes et les penseurs !

Le rayon faufilé dans l’ombre,
Dans lequel, seul, on peut les voir,
Est trop étroit pour leur grand nombre,
Et beaucoup restent dans le noir.