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Scène V

ROXANE, CYRANO et, un moment Sœur MARTHE.
Roxane, sans se retourner.

Qu’est-ce que je disais ?…

(Et elle brode. Cyrano, très pâle, le feutre enfoncé sur les yeux, paraît. La sœur qui l’a introduit rentre. Il se met à descendre le perron lentement, avec un effort visible pour se tenir debout, et en s’appuyant sur sa canne. Roxane travaille à sa tapisserie.)

Qu’est-ce que je disais ?…Ah ! ces teintes fanées…
Comment les rassortir ?

(À Cyrano, sur un ton d’amicale gronderie.)

Comment les rassortir ?Depuis quatorze années,
Pour la première fois, en retard !

Cyrano, qui est parvenu au fauteuil et s’est assis, d’une voix gaie contrastant avec son visage.

Pour la première fois, en retard !Oui, c’est fou !
J’enrage. Je fus mis en retard, vertuchou !…

Roxane.

Par ?

Cyrano.

Par ?Par une visite assez inopportune.

Roxane, distraite, travaillant.

Ah ! oui ! quelque fâcheux ?

Cyrano.

Ah ! oui ! quelque fâcheux ?Cousine, c’était une
Fâcheuse.

Roxane.

Fâcheuse.Vous l’avez renvoyée ?

Cyrano.

Fâcheuse.Vous l’avez renvoyée ?Oui, j’ai dit :
Excusez-moi, mais c’est aujourd’hui samedi,
Jour où je dois me rendre en certaine demeure ;
Rien ne m’y fait manquer : repassez dans une heure !