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Car tous, cessant de rire et de m’injurier,
Se rapprochent de moi, maintenant !

PATOU, voyant que tous, en se rapprochant de Chantecler, observent le ciel avec inquiétude, lève la tête, regarde, et dit simplement :

Se rapprochent de moi, maintenant ! L’Épervier !

CHANTECLER.

Ah !

Une ombre passe avec lenteur sur la foule bariolée, qui se serre et qui se baisse, en se rapprochant de plus en plus, instinctivement, de Chantecler.
PATOU.

Ah ! On ne compte pas, quand sa grande ombre passe,
Sur les Coqs étrangers pour chasser le Rapace !

CHANTECLER, soudain relevé, grandi, ses blessures oubliées,
gagne le milieu, et de sa voix de commandement :

Oui ! tous autour de moi !

Et tous, aussitôt, la tête rentrée dans les ailes, viennent précipitamment s’écraser autour de lui.
LA FAISANE.

Oui ! tous autour de moi ! Cher être brave et doux !

L’ombre passe une seconde fois. Le Coq de Combat lui-même se fait petit. Il n’y a plus que Chantecler debout au milieu d’un tas de plumes ébouriffées et tremblantes.
UNE POULE, suivant des yeux l’Épervier.

Deux fois déjà son ombre a mis du noir sur nous !

CHANTECLER, appelant les Poussins qui courent affolés.

Par ici, les Poussins !

LA FAISANE.

Par ici, les Poussins ! Tu les prends sous ton aile ?

CHANTECLER.

Il faut bien… Leur maman est artificielle !

L’ombre de l’Épervier, qui décrit des cercles toujours plus bas, passe une troisième fois, plus noire.