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LA FAISANE, écoutant toujours.

Un nid semble tombé dans la petite rue…

CHANTECLER, dont l’émotion grandit.

L’école.

LA FAISANE.

Des lutins que je ne peux pas voir
Se donnent des soufflets dans de l’eau…

CHANTECLER.

Se donnent des soufflets dans de l’eau… Le lavoir !

LA FAISANE.

Et, tout d’un coup, de tous les côtés, qui sont-elles
Ces cigales de fer qui se frottent les ailes ?…

CHANTECLER, se redressant, plein d’orgueil.

Ah ! puisque sur les faulx passent les affiloirs,
Les faucheurs dans les blés vont s’ouvrir des couloirs !

Les bruits augmentent et se mêlent : cloches, marteaux, battoirs, rires, chansons, grincements d’acier, claquements de fouets.

Tout travaille !… Et j’ai fait cela !… C’est impossible !
Ah ! Faisane, au secours ! Voici l’instant terrible !

Il regarde autour de lui, avec égarement.

J’ai fait lever le jour… moi ! Pourquoi ? Comment ? Où ?
Sitôt que ma raison revient, je deviens fou !
Car moi qui crois pouvoir rallumer l’or céleste,
Eh bien… ah ! c’est affreux !…

LA FAISANE.

Eh bien… ah ! c’est affreux !… Quoi donc ?

CHANTECLER.

Eh bien… ah ! c’est affreux !… Quoi donc ? Je suis modeste !
Tu ne le diras pas ?

LA FAISANE.

Tu ne le diras pas ? Non, mon Coq !

CHANTECLER.

Tu ne le diras pas ? Non, mon Coq ! Tu promets ?
— Ah ! que mes ennemis ne le sachent jamais !