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Scène IX

LE DUC, MARIE-LOUISE, SCARAMPI, puis UN TAILLEUR et UNE ESSAYEUSE.
MARIE-LOUISE, au duc.

Chez elle…Franz…
Chez elle…Franz…(Il se retourne.)
Chez elle…Franz…Je vais vous égayer…

LE DUC.

Chez elle…Franz…Je vais vous égayer…Vraiment ?

(Scarampi ferme soigneusement toutes les portes.)
MARIE-LOUISE.

Chut ! — J’ai fait un complot !…

LE DUC, dont l’œil s’allume.

Chut ! J’ai fait un complot !…Vous, un complot !

MARIE-LOUISE.

Chut ! J’ai fait un complot !…Vous, un complot !Immense !
Chut ! — On nous interdit tout ce qui vient de France !
Mais moi, j’ai fait venir en secret, de Paris,
De chez deux grands faiseurs…
De chez deux grands faiseurs…(Elle lui donne une petite tape sur la joue.)
De chez deux grands faiseurs…Allons, coquet, souris !
Chut !… pour vous un tailleur…
Chut !… pour vous un tailleur…(Montrant Scarampi.)
Chut !… pour vous un tailleur…Pour nous, une essayeuse !
Je crois que mon idée est vraiment !…

LE DUC, glacial.

Je crois que mon idée est vraiment !…Merveilleuse.

SCARAMPI, allant ouvrir la porte de l’appartement de Marie-Louise.

Entrez !

(Entrent une demoiselle — élégance de mannequin — qui porte de grands cartons à robes et à chapeaux, puis un jeune homme habillé comme une gravure de modes 1830, les bras chargés de vêtements pliés et de boîtes. Le tailleur descend vers le duc, tandis qu’au fond, l’essayeuse déballe les robes sur un canapé. Après un profond salut, il s’agenouille vivement, ouvrant les boîtes, défaisant les paquets, faisant bouffer des cravates, dépliant des vêtements.