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LE DUC.

Ah ! des buissons de bras se crispent sur la plaine !
(Il veut marcher.)
Et je foule un gazon d’épaulettes de laine !

UN CRI, à droite.

À moi !

LE DUC, chancelant.

À moi !J’ai glissé sur un baudrier de cuir !

(Il va vers la gauche, faisant à chaque instant le mouvement d’enjamber.)
UNE VOIX, à gauche.

Dragon ! tends-moi les mains !

UNE AUTRE, répondant froidement.

Dragon ! tends-moi les mains !Je n’en ai plus.

LE DUC, éperdu.

Dragon ! tends-moi les mains !Je n’en ai plus.Où fuir ?

UNE VOIX MOURANTE, tout près.

À boire !

CRI AU LOIN.

À boire !Les corbeaux !

LE DUC.

À boire !Les corbeaux !Oh ! c’est épouvantable !
Oh ! les soldats de bois alignés sur ma table !

L’OMBRE, LE VENT, LES BROUSSAILLES.

Oh !…

LE DUC, avec désespoir.

Oh !…Spectres chamarrés de blessures, vos yeux
M’épouvantent ! — Du moins, vous êtes glorieux !
Vous portez de ces noms dont la patrie est fière !
(À l’un de ceux qu’il croit voir.)
Comment t’appelles-tu ?

UNE VOIX.

Comment t’appelles-tu ?Jean.

LE DUC, à un autre.

Comment t’appelles-tu ?Jean.Toi ?

UNE VOIX.

Comment t’appelles-tu ?Jean.Toi ?Paul.

LE DUC.

Comment t’appelles-tu ?Jean.Toi ?Paul.Et toi ?

UNE VOIX.

Comment t’appelles-tu ?Jean.Toi ?Paul.Et toi ?Pierre.