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Mais ne donnez pas trop dans le quatre-vingt-neuf,
Ou bien nous briserions la coquille d’un œuf…

L’ATTACHÉ, immédiatement effrayé.

Est-ce une allusion au prince François-Charle ?…

METTERNICH.

Duc de Reichstadt ?… Je n’admets pas, moi qui vous parle,
Que son père ait jamais régné !

L’ATTACHÉ, avec une générosité ironique.

Que son père ait jamais régné !Moi, je l’admets.

METTERNICH.

Je ne ferai donc rien pour le duc. Mais… mais…

L’ATTACHÉ.

Je ne ferai donc rien pour le duc. Mais… mais…Mais ?

METTERNICH.

Mais si la liberté chez vous devient trop grande,
Si vous vous permettez la moindre propagande,
Mais si vous laissez trop Monsieur Royer-Collard
Venir devant le roi déplier son foulard ;
Si votre royauté fait trop la République ;
Nous pourrons — n’étant pas d’une humeur angélique ! —
Nous souvenir que Frantz est notre petit fils…

L’ATTACHÉ, vivement.

Nous ne laisserons pas rougir nos lys.

METTERNICH, gracieux.

Nous ne laisserons pas rougir nos lys.Vos lys,
S’ils savent rester blancs, ignoreront l’abeille.

L’ATTACHÉ, se rapprochant et baissant la voix.

On craint que malgré vous l’espoir du duc s’éveille.

METTERNICH.

Non.

L’ATTACHÉ.

Non.Les événements ?

METTERNICH.

Non.Les événements ?Je les lui filtre.

L’ATTACHÉ.

Non.Les événements ? Je les lui filtre.Quoi ?
Ignore-t-il qu’en France on a changé de roi ?