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LE DUC, voulant fuir, mais ne pouvant pas, comme dans un cauchemar,
— et saisissant l’oranger pour ne pas tomber.

Oh ! je voudrais m’enfuir ! oh ! je reste !

BOMBELLES, se penchant sur le bras de Marie-Louise.

Oh ! je voudrais m’enfuir ! oh ! je reste !Quel est
Ce caillou gris que vous portez en bracelet ?

MARIE-LOUISE, tout d’un coup très émue.

Ah ! je ne peux le voir qu’avec des yeux humides !
Ça… voyez-vous… c’est un morceau…

BOMBELLES, vivement.

Ça… voyez-vous… c’est un morceau…Des Pyramides ?

MARIE-LOUISE, sentimentale.

Mais non, voyons ! C’est un vrai morceau du tombeau
Où Juliette dort auprès de Roméo !
(Elle soupire.)
Ce souvenir me vient…

BOMBELLES, respectueusement crispé.

Ce souvenir me vient…Vous n’allez pas, de grâce,
Me parler de Neipperg !

MARIE-LOUISE.

Me parler de Neipperg !Oui, Neipperg vous agace !
Pourquoi parler de l’autre, alors ?

BOMBELLES, avec la conviction d’un homme qui préfère être préféré à Napoléon Ier qu’à Monsieur de Neipperg.

Pourquoi parler de l’autre, alors ?C’est différent !
(Et avec plus de curiosité que de jalousie.)
Vous, — l’aimiez-vous ?

MARIE-LOUISE, qui n’y est déjà plus.

Vous, — l’aimiez-vous ?Qui donc ?

BOMBELLES.

Vous, — l’aimiez-vous ?Qui donc ?L’Autre !

MARIE-LOUISE.

Vous, — l’aimiez-vous ?Qui donc ?L’Autre !Ça vous reprend ?

BOMBELLES.

Un si grand homme, on doit…

MARIE-LOUISE.

Un si grand homme, on doit…Quant à cela, je nie