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(Prêtant l’oreille au pas qui s’est rapproché de la porte.)

C’est lui ! — Sa main tâtonne au battant verrouillé…
Il va sortir. Voilà !
Il va sortir. Voilà !(Avec désespoir.)
Il va sortir. Voilà !Vous l’avez réveillé.

METTERNICH.

Non, il ne se peut pas que ce soit lui qui sorte !
Il ne va pas ouvrir lentement cette porte !
C’est le duc de Reichstadt, voyons ! je n’ai pas peur !
Je sais que c’est le duc ! j’en suis sûr.
(La porte s’ouvre.)

FLAMBEAU, d’une voix sonore.

Je sais que c’est le duc ! j’en suis sûr.L’Empereur !

(Il présente les armes. — Metternich se rejette en arrière. — Mais au lieu de la terrible petite silhouette trapue que ce grenadier de la Garde présentant les armes faisait presque attendre, c’est, sur le seuil, l’apparition chancelante d’un pauvre enfant trop svelte, qui a quitté ses livres pour venir en toussant voir ce qui se passe, et qui s’arrête, blanc comme son habit, en levant sa lampe de travail, — rendu plus féminin par son col dégrafé d’où s’échappe du linge, et par ses cheveux plus blonds sous l’abat-jour.)



Scène IX

Les Mêmes, LE DUC, puis des LAQUAIS.
METTERNICH, se précipitant vers lui avec un rire nerveux.

Ah ! ah ! c’est vous ! c’est vous ! c’est vous ! C’est Votre Altesse !
Ah ! que je suis heureux !

LE DUC, ironiquement.

Ah ! que je suis heureux !D’où vient cette tendresse ?

METTERNICH.

Non ! vraiment, je croyais — tant c’était réussi !
Qu’un autre allait sortir !

FLAMBEAU, comme sortant du rêve auquel il s’est pris lui-même.

Qu’un autre allait sortir !Je le croyais aussi !