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MARIE-LOUISE, s’essuyant les yeux.

Exprimer…Oui, ce fut une bien grande perte !
On a trop peu connu cette belle âme !

THÉRÈSE, frémissante.

On a trop peu connu cette belle âme ! Oh ! certe !

MARIE-LOUISE, se retournant, à Bombelles.

Je viens d’écrire pour qu’on garde son cheval !
(À Thérèse)
Depuis la mort du général…

THÉRÈSE, étonnée.

Depuis la mort du général…Du général ?

MARIE-LOUISE, s’essuyant les yeux.

Il conservait ce titre.

THÉRÈSE.

Il conservait ce titre.Ah ! Je comprends !

MARIE-LOUISE.

Il conservait ce titre.Ah ! Je comprends ! … je pleure !

THÉRESE, avec sentiment.

Ce titre n’est-il pas sa gloire la meilleure ?

MARIE-LOUISE.

On ne peut pas savoir d’abord tout ce qu’on perd :
J’ai tout perdu, perdant le général Neipperg !

THÉRESE, stupéfaite.

Neipperg ?

MARIE-LOUISE.

Neipperg ?Je suis venue à Baden me distraire.
C’est bien. Tout près de Vienne. Une heure. — Ah ! Dieu ! ma chère.
J’ai les nerfs !… On prétend depuis que j’ai maigri
Que je ressemble à la duchesse de Berry.
Vitrolles m’a dit ça. — Maintenant je me frise
Comme elle. — Pourquoi Dieu ! ne m’a-t-il pas reprise ? —
(Regardant autour d’elle).
C’est petit, mais ce n’est pas mal, cette villa.
— Metternich est notre hôte en passant. — Il est là.
Il part ce soir. — La vie à Baden n’est pas triste.
Nous avons les Sandor, et Thalberg, le pianiste.
On fait chanter, en espagnol, Montenegro ;
Puis Fontana nous hurle un air de Figaro ;