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Scène première

Un GARDE-NOBLE, des ARCIÈRES, des PAYSANS, des BOURGEOIS, des FEMMES, des ENFANTS, etc…, puis L’EMPEREUR FRANZ.
LE GARDE-NOBLE.

Rangez-vous ! Chut, le vieux ! — Toi, le petit, sois sage !
(Il montre la porte du second plan, à droite.)
L’Empereur vient par là. — Laissez-lui le passage !
— Le géant montagnard, ne raclez pas vos pieds !

UN HOMME, timidement.

Il passe devant nous ?

LE GARDE-NOBLE.

Il passe devant nous ?En prenant les papiers.
Tenez bien vos petits papiers en évidence !
(Tous les petits papiers palpitent au bout des doigts.)
Ne lui racontez pas d’histoires !
(Tout le monde est rangé. Il va se placer près de la table, puis se rappelant une recommandation à faire :)
Ne lui racontez pas d’histoires !Ah !… défense
De se mettre à genoux quand il entre !

UNE FEMME, à part.

De se mettre à genoux quand il entre !Défends !
Ça n’empêchera pas…
(La porte s’ouvre. L’Empereur paraît. Tout le monde se met à genoux.)

L’EMPEREUR, très simplement.

Ça n’empêchera pas…Levez-vous, mes enfants

(Il descend. Les petits papiers palpitent de plus en plus. Il a sa longue tête triste des portraits. Mais un grand air de bonté. Il est vêtu, avec une bonhomie voulue, du costume bourgeois qu’il affectionne : redingote de drap gris s’ouvrant sur un gilet paille ; culotte de drap gris entrant dans des bottes. Il prend la supplique que lui tend une femme, la lit, et la passe au chambellan qui le suit, en disant :)

La pension doublée.

LA FEMME, se prosternant.

La pension doublée.Ah ! Sire !

L’EMPEREUR, après avoir lu la supplique que lui tend un paysan.

La pension doublée.Ah ! Sire !Hé ! hé ! la paire