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Qu’à la condition d’être bonapartiste ;
Qu’en vain ils ont un coq qui se donne du mal
Pour ressembler, de loin, à l’aigle impérial ;
Qu’on trouve irrespirable, en France, un air sans gloire ;
Qu’une couronne ne tient pas sur une poire ;
Que la jeunesse, autour de vous, va se ranger,
En fredonnant une chanson de Béranger ;
Que la rue a frémi, que le pavé tressaille,
— Et que Schœnbrunn est bien moins joli que Versailles.

LE DUC, debout.

J’accepte… je fuirai…

(On entend une musique militaire, dehors. Le duc tressaille.)
FLAMBEAU, qui a couru à la fenêtre.

J’accepte… je fuirai…Sur l’escalier d’honneur,
C’est la musique de la garde. — L’Empereur
Doit rentrer au château.

LE DUC, dégrisé.

Doit rentrer au château.Mon grand-père qui rentre !
Ma promesse !…
Ma promesse !…(À Flambeau.)
Ma promesse !…Non ! non ! avant d’accepter…

FLAMBEAU, inquiet.

Ma promesse !…Non ! non ! avant d’accepter…Diantre !

LE DUC.

… Je dois tenter auprès de lui… ! Mais si ce soir,
Quand tu viendras ici me garder, tu peux voir
Quelque chose… que tu n’y vois pas d’habitude,
C’est que j’accepte alors de m’enfuir !…

FLAMBEAU, en gamin de Paris.

C’est que j’accepte alors de m’enfuir !…Ô Latude !
Quel sera ce signal ?

LE DUC.

Quel sera ce signal ? Tu le verras !

FLAMBEAU.

Quel sera ce signal ? Tu le verras ! Oui, mais…

(La porte s’ouvre. Il s’éloigne vivement du duc et a l’air de ranger dans la pièce. On voit paraître sur le seuil un garde noble hongrois, rouge et argent, botté de jaune, la peau de panthère sur l’épaule, et le bonnet de fourrure surmonté d’un long plumet blanc à monture d’argent.)