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Admirer davantage en sa rougeur qui bouge,
C’était qu’elle bougeât, ou bien qu’elle fût rouge.
Soudain, m’étant penché, je sentis, inquiet,
Que vos petites mains tripotaient mon plumet.
Le maréchal Duroc me dit d’un ton sévère :
« Laissez faire Sa Majesté ! ». Je laissai faire.
J’entendais — ayant mis à terre le genou —
Rire le maréchal, la dame, et la nounou…
Et quand je me levai, toute rouge était l’herbe,
Et j’avais pour plumet un fil de fer imberbe.
« Je vais signer un bon pour qu’on t’en rende deux ! »
Dit Duroc. — Je revins au quartier, radieux !
« Hé ! psitt ! là-bas ! Qui donc m’a déplumé cet homme ? »
Dit l’adjudant. Je répondis : « Le Roi de Rome. »
— Voilà comment je fis connaissance, un jeudi,
De Votre Majesté. Votre Altesse a grandi.

LE DUC.

Non, je n’ai pas grandi — c’est bien là ma tristesse ! —
Puisque Sa Majesté n’est plus que Son Altesse.

MARMONT, bourru, à Flambeau.

Et qu’as-tu fait depuis que l’Empire est tombé ?

FLAMBEAU, le toisant.

Je crois m’être conduit toujours comme un bon…

(Il va lâcher le mot, mais la présence du prince le retient, et il dit seulement.)

Je crois m’être conduit toujours comme un bon…B.
Je connais Solignac et Fournier-Sarlovèze,
Conspire avec Didier, en mai mil huit cent seize ;
Complot raté ; je vois exécuter Miard,
Un enfant de quinze ans, et David, un vieillard.
Je pleure. On me condamne à mort par contumace.
Bien. Je rentre à Paris sous un faux nom. Je casse,
Sous prétexte qu’il mit sa botte sur mes cors,
Un tabouret de bois sur un garde du corps.
Je préside des punchs terribles. Je dépense
Soixante sous par mois. Je garde l’espérance
Que l’Autre peut encor débarquer, dans le Var !