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DE DENTRECASTEAUX.

1792.
Juin.
navigateurs à s’en défier ; c’est une chose prodigieuse, et peut-être sans exemple qu’un ressif d’une si grande étendue en latitude et en longitude, qui brise sans laisser apercevoir le moindre espace libre : le seul point sur lequel il puisse nous rester quelque incertitude, est, comme nous l’avons déjà dit, celui qui est vis-à-vis du Havre trompeur. Dans la soirée du 28, quelques personnes crurent remarquer une autre issue ; mais comme elle fut dépassée avec une grande vitesse, les avis restèrent partagés : il eût été impossible d’envoyer une embarcation pour la visiter, parce que la mer étoit trop grosse ; cependant ne voulant négliger aucun moyen de la reconnoître, je me décidai à courir un très-long bord au large pour m’élever dans le Sud-Est, et me trouver le lendemain au vent du point où l’on avoit cru l’apercevoir. Mais je perdis considérablement pendant la nuit, parce que les vents furent forts et que je fus obligé de diminuer de voiles, pour ne pas m’éloigner de l’Espérance, qui marchoit mal et qui avoit toutes les voiles qu’elle pouvoit porter. Forcé de renoncer à la vérification de cette seconde coupure, je continuai à suivre le ressif, dans l’espoir de pouvoir aborder du moins à quelqu’une des îles situées dans le Nord-Ouest de la Nouvelle-Calédonie ; mais elles sont également défendues par la continuation du même ressif, et il a fallu se borner à les voir d’aussi près que les brisans ont permis de les approcher : nulle apparence de passage ne s’est offert à notre vue ; peut-être, dans un temps parfaitement calme, trouveroit on quelque interstice où une petite embarcation pourroit