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VOYAGE

1792.
Mai.
»d’arbres dont les tiges sembloient se perdre dans l’horizon. »

»Le canot avançoit avec une vîtesse que je ne voulois pas diminuer en sondant ; d’ailleurs je devois profiter de cette journée favorable pour étendre ma course le plus loin qu’il me seroit possible. »

»Je dirigeai la route sur l’ouverture qui me restoit au Nord et Nord-Nord-Ouest ; et j’entrai dans un canal de même largeur que celui par lequel j’étois arrivé dans la baie de l’Isthme. Les terres de tribord et de bâbord formoient des enfoncemens plus ou moins grands. Après avoir couru quelque temps au Nord, ma route prit de l’Est : parvenu à la partie la moins large du canal, je vis, dans un grand éloignement, une espèce de goulet, au travers duquel je crus apercevoir la pleine mer. J’osai me flatter que c’étoit le terme de mon voyage ; et déjà je me félicitois d’avoir rempli ma mission en si peu de temps. En effet, tout me portoit à croire que ce canal communiquoit avec la mer : on commençoit à ressentir un peu de houle ; les eaux avoient conservé la même âcreté dans toute l’étendue que j’avois parcourue : le courant avoit toujours eu assez de force, et je n’avois vu nul rétrécissement progressif dans ce canal, si ce n’est près des pointes avancées ; mais après les avoir doublées j’entrois dans des baies spacieuses. »

»Lorsque j’eus fait environ une demi-lieue, en continuant de courir au Nord-Nord-Est, j’aperçus des terres par-delà le goulet, mais à toute vue. Je craignis de me livrer trop à l’espérance ; mais, après m’être approché de