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VOYAGE

1792.
Mai.
d’autant moins, que quelques jours après, par le même temps, le baromètre étoit à vingt-huit pouces quatre lignes, c’est-à-dire d’un pouce plus élevé qu’il ne l’avoit été dans les mêmes circonstances. On appareilla dès que le courant devint favorable, et l’on courut des bords pendant toute la journée ; ce ne fut qu’à la nuit que nous parvînmes à doubler l’île aux Perdrix, qui forme l’entrée de la baie : elle fut rangée d’aussi près que le vent le permit ; et dès que la pointe Nord de cette île eut fermé la passe, nous laissâmes tomber l’ancre par vingt-huit brasses fond de vase. La nuit close nous priva de la vue de cette vaste et superbe baie : cette satisfaction nous fut réservée pour le lendemain. De très-grand matin, nous nous disposions tous à jouir de ce spectacle ; mais le temps fut d’abord si obscur, que l’on ne distinguoit guère mieux les objets qu’au moment où nous avions mouillé : le ciel s’éclaircit peu à peu dans la matinée, et chaque nouveau rayon de lumière nous fit découvrir de nouvelles beautés ; de tous côtés l’on apercevoit des baies d’une immense profondeur, toutes également abritées contre les vents, et où la mer n’étoit agitée que par les lames qui se formoient dans l’étendue de leur bassin. Les terres hautes et couvertes d’arbres dont les différentes baies sont entourées, annonçoient par-tout un fond également bon et sans écueils. Aucun des navigateurs de l’expédition n’avoit encore vu, dans ses voyages, de mouillage aussi vaste et aussi sûr ; toutes les flottes du monde pourroient s’y trouver rassemblées, et elles laisseroient encore de grands espaces à remplir : mais

comme