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VOYAGE

1792.
Avril.
nous avons observé que presque tous les arbres étoient inclinés du côté de l’Est. Ils ont, en général, de ce même côté, une empreinte de feu telle, que leur tige, qui est blanche vue du côté de l’Ouest, est noire et charbonnée de l’autre côté. Cet effet semble ne pouvoir être produit que par le feu mis aux joncs et autres herbes dont la terre est couverte dans la saison des vents d’Est : la flamme étant poussée par ces mêmes vents dans une direction opposée, donne aux arbres qui se trouvent sur son passage une teinte noire.

L’aspect que présentoit l’intérieur de ces arbres, est vrai­ment remarquable. Il est probable qu’ils commencent à se gâter intérieurement, lorsqu’ils ont acquis un certain degré de vétusté. Nous en avons abattu plusieurs de grande dimension, qui n’avoient pas encore subi l’action du feu , mais dont le cœur paroissoit entièrement vermoulu, quoique le dehors eût l’air parfaitement sain. C’est, sans doute, à cet état intérieur de dépérissement que l’on doit attribuer l’effet assez surprenant d’arbres creusés par le feu dans toute leur longueur, tandis que l’écorce, ou du moins l’enveloppe, est absolument intacte. En effet, le feu mis au pied des arbres que le temps a réduits à cet état, doit trouver moins de résistance dans l'intérieur, qui est décomposé et propre à la combustion. La grande humidité du terrain entretient le feuillage de ces arbres dans un état de fraîcheur qui annonce une végétation assez forte ; et l'on peut aussi attribuer à la même humidité cet état d'altération intérieur qui les rend si combustibles.