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s’avivait, se plissait ; elle coulait des buissons en cascatelles rutilantes, s’éparpillait en guêpes de clarté à la brise, et, aux places rares où l’eau pouvait la réfléchir, oscillait largement. Un vaste, un stupéfiant silence régnait.

Je restais immobile au seuil de cette féerie. Ma plus lointaine enfance guidait tous mes actes. J’avais de cet âge la naïve admiration et la mystérieuse terreur, l’invisible curiosité et l’horripilation de l’occulte. Je me crus à quelque ville de légende où les Hommes-des-Eaux auraient trouvé moyen d’éclairer le dessous du lac ; je me figurais cette humanité nouvelle, inaccessible à ma faiblesse ; j’eus, moi, le représentant des races supérieures, l’impression peureuse, mélancolique, résignée, des races vaincues ; d’innombrables choses croulèrent en moi qui n’y étaient que par la certitude d’appartenir à la plus haute humanité. Je compris le glissement à l’abîme de nos pauvres