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LES NAVIGATEURS DE L’INFINI

Dans les parois, étaient creusées des excavations de forme régulière d’où nous vîmes sortir plusieurs douzaines de Tripèdes.

Parmi eux, le Chef Implicite. Et près de lui, en retrait, celle qui m’avait fait connaître « un ravissement qui tenait de la magie et qui m’exaltait comme jadis les déesses purent exalter un Hellène mystique — une tendresse sans analogie avec aucune tendresse connue ».

Sera-ce la déception fatale des recommencements ? Déjà une atmosphère infiniment délicate émanait d’elle ; Violaine perdit son prestige ; sa beauté s’alourdit et se couvrit de brumes : elle fut trop semblable à moi-même.

D’ailleurs, Grâce l’hypnotisait ; elle la contemplait avec une sorte de stupeur.

« C’est inconcevable », chuchota-t-elle.

Tandis que la jeune Martienne s’avançait, son atmosphère fit reparaître à « l’état naissant » cette étrange et subtile volupté sans ressemblance avec aucune volupté terrestre, et qui semblait me douer d’un sens nouveau.

Je chercherais en vain une comparaison : toute métaphore serait vaine, et trompeuse. Ni les parfums des végétaux, fleurs, feuilles ou herbes, ni l’ivresse des matins où il semble que l’univers vient de naître, ni l’amour le plus pur n’ont de ressemblance avec cette sensation, et certes moins encore l’amour à l’état brut.

La seule Grâce me l’a fait connaître sur la terre martienne, quoiqu’elle ait des sœurs très belles.