Page:Rosny aîné - Le Cœur tendre et cruel, 1924.djvu/84

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

voyait la dentelle verte des carottes, les feuilles chagrines de la pomme de terre, de fumeux panaches d’asperges et les vases fragiles des capucines. Dans ce petit terroir falot et artificieux, le père Brisemiche servait l’Aphrodite. En semaine, les sacrifices étaient rares ; l’autel, montrant ses crevasses, sentait la graisse ancestrale, le beurre rance et les oignons d’antan. Tout autour croissaient des bâtisses sournoises : c’était la vie nouvelle. Elle dévorait la lumière de la guinguette, elle annonçait des temples concurrents où roustissaient les cœurs et les viandes.

— Corbleu ! criait le père Brisemiche, là-dedans, elles mangeront du chameau et du beurre de chien crevé, les bougresses !

Car, dans la clientèle, il ne voyait que le féminin.