rassiers aux grands feutres. Les cris reprirent, avec la menace des poings innombrables. Deux cortèges sinistres défilèrent devant les cuirassiers et les dragons immobiles…
Chapeau bas et suivi par trois cents hommes, François escortait les cadavres. Une tristesse de néant glaçait son crâne, toute sa volonté se concentrait à ne pas laisser les morts aux mains de l’ennemi.
Le préfet et les officiers laissèrent passer cinq ou six cents hommes, qui condensaient l’énergie révolutionnaire. Ensuite, ils n’eurent qu’à couper la file. La vague multitude reflua le long des barricades.
Cependant, comme naguère, un instinct unanime poussait les porteurs de cadavres vers les forges et l’Internationale s’élevait lente et lourde :
Debout, les damnés de la terre !
Debout, les forçats de la faim !
Les forges apparurent, faiblement gardées. Une trentaine d’agents, deux escouades de dragons circulaient devant les grilles. Derrière, le désert noir des cours, la maussade structure des bâtisses et les terribles cheminées, obélisques de feu, phares géants de l’énergie humaine. À leur vue, les grévistes rugirent :
— Les morts dans les forges.
Un même halètement secoua toutes les poitrines. Le cortège passa comme une trombe ; les sergents de ville ahuris, les dragons émus, ne firent guère de résistance : d’ailleurs des masses ardentes accouraient, fuyards revenus de leur panique, nouveaux arrivants, qui aggravaient le désordre. Arrachée de ses gonds, une porte claqua ; on vit les cadavres dans la grande cour ; Rougemont cria :
— Exploiteurs, voilà votre œuvre. C’est votre