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s’exclama-t-il. Le président l’a dit, c’est une séance de propagande. Et pendant une séance de propagande, on ne doit pas discuter sur les candidatures.

— C’est une séance mixte.

— Non, c’est une séance de propagande. La preuve, c’est que nous avons fait coller une affiche pour inviter les camarades non syndiqués. Il y a ici plus de non syndiqués que de syndiqués. Comment pourrait-on voter sur l’admission du camarade Grenu ?… C’est logique, voyons.

Cette fois, il connut les joies de la victoire : l’assemblée, d’un seul hochement, reconnut le bien fondé de sa réclamation. Et le père Bougeot conclut :

— Alors, il n’y a qu’à remettre la discussion à la première assemblée générale. La parole est au citoyen Lapouge.

Le citoyen Lapouge était collé contre la muraille, au dernier banc. Son visage exprimait un dégoût amer et funèbre ; il portait une barbe beaucoup plus épaisse à droite qu’à gauche, et il s’avança vers les tables comme s’il marchait à l’échafaud :

— Le camarade Rougemont, commença-t-il d’une voix de zinc, a dit qu’il ne passerait pas de pommade aux afficheurs. Il a tenu parole. Moi, ça sera pire. Je vais leur étriller le ventre. Compagnons, j’espère que vous ne savez pas qu’un grand nombre des vôtres essayent continuellement de prendre aux chômeurs l’affichage de la Bourse du travail ? Ils tirent ainsi le pain de la bouche des chômeurs qui, seuls, doivent bénéficier de l’argent consacré par les syndicats et la C. G. T. à l’affichage. Si encore ils demandaient simplement à faire la besogne, mais pas du tout, ils se plaignent eux-mêmes d’être des sans-travail, ils arrivent à leurs fins par la blague et par la frime. Afficheurs, ce sont là des faits malhonnêtes et scandaleux, que justifie seule une mentalité d’inconscients. Votre devoir est de les