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de vous-mêmes, elle est une vertu pratique dont chacun doit, à la longue, tirer son profit ! Ce n’est pas la stérile charité que nous prêchent avec un touchant ensemble les curés et les bourgeois, et qui ne conduit qu’à la résignation, à la veulerie et à l’esclavage, c’est un ferment actif, c’est l’entr’aide généreuse qui doit finalement sauver tous les hommes. En attendant, elle peut améliorer le sort de ceux qui savent la pratiquer et la comprendre. Il y a dix ans à peine, les bonnes volontés ne pouvaient pas servir à grand’chose. Le prolétaire n’avait aucune arme, rien que sa ridicule carte d’électeur, rien que des partisans de l’assiette au beurre pour faire semblant de le défendre, en réalité pour l’asservir à des lois inévitablement mauvaises. Car dès qu’une bonne chose est mise en loi, elle ne peut plus servir au pauvre ; le riche la tourne comme il veut — et s’en sert à son profit. Aussi, la bonne volonté n’aboutissait jadis qu’à se faire bafouer par un tas de farceurs et de saltimbanques. L’ère syndicaliste a transformé tout cela. La bonne volonté devient une chose utile et pratique ; on sait où et comment s’en servir : il n’y a qu’à faire partie d’un bon syndicat. Alors on cesse d’être une piteuse créature solitaire, une sorte de chien à deux pattes cherchant sa pâtée dans les poubelles bourgeoises ; on fait partie d’une force… la seule force ouvrière possible, jusqu’au jour de l’expropriation capitaliste ; la seule où l’on est entre gens de même farine, où chacun poursuit le même but. Il ne s’agit plus de mettre un morceau de papier dans une boîte pour se donner un maître, il s’agit de se réunir à mille, à dix mille et de faire entendre son rugissement…

Afficheurs, il y a trop longtemps que vous méconnaissez le syndicalisme. Vous abandonnez les vaillants qui vous ont convoqués ce soir, vous les laissez seuls en face de la fourberie patronale. On m’a dit que certains sont mécontents de ceux qui