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Et pour qu’on les demande, il n’y a qu’à changer les bases du crédit et pourvoir chacun selon ses besoins.

Alors, n’est-ce pas, il se passe quelque chose de monstrueux dans le monde ! Il ne s’agit pas seulement de l’égoïsme et de la rapacité bourgeoise, il s’agit surtout de son imbécillité. Ah ! laissez-moi rire, lorsqu’on ergote sur la concurrence, sur la loi de l’offre et de la demande, sur le libre échange et sur le protectionnisme ! Car il n’y a pas de concurrence, il n’y a pas de loi d’offre et de demande, il n’y a pas de libre échange, et il n’y a d’autre protectionnisme que celui du champ, de l’usine et des entrepôts bourgeois. La concurrence véritable, d’homme à homme, est étouffée dès l’enfance ; la loi de l’offre et de la demande est pourrie jusqu’à la racine ; le libre échange n’existe sur aucun coin d’aucun territoire capitaliste. Ce sont autant de vessies et de fantômes destinés à vous cacher un problème simple.

Abordons-le, ce problème. Regardons-en d’abord les grands côtés, ceux dont dépendent tous les autres. Partons de la nourriture. Il s’agit de résoudre les deux questions suivantes : comment produire la quantité de nourriture utile ? Comment la distribuer ? Jadis, la production du blé, de la viande, des légumes, constituait en somme une œuvre difficile. L’outillage était insuffisant ; la terre était mal préparée, ou tout au moins, il y avait relativement peu de terres dont on pouvait tirer un parti convenable. Une proportion énorme du travail devait être consacrée à l’agriculture. En exceptant quelques lieux privilégiés, la nourriture disponible était insuffisante pour l’ensemble des hommes. Presque forcément, il fallait des pauvres et des riches. Par-dessus le marché, quand la récolte avait été mauvaise, éclatait la famine : les moyens de transport étaient peu développés et d’une lenteur désespé-