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il n’avait pu faire usage chez l’entrepreneur. Ayant obtenu l’aveu que Flammant, quoique ladre, n’était pas un mauvais homme et qu’on exagérait le truquage, il poussa résolument aux concessions :

— Et vous savez, il vous permet de chanter la Carmagnole et l’Internationale.

Les charpentiers s’esclaffèrent. Ils consentirent à traiter moins sévèrement leur patron, mais en retour, ils saluaient sa présence par quelque fredon révolutionnaire, et lorsque les deux renards furent congédiés, il y eut un chœur formidable :

...............................Ah ! ça ira, ça ira, ça ira,
...............................Les deux renards à la lanterne !
...............................Ah ! ça ira, ça ira, ça ira,
...............................Les deux renards on les pendra !

La légende fit de l’événement une nouvelle victoire du propagandiste.


Les incidents de la maréchalerie Mercœur demandèrent plus de soins, de tactique et de prudence. Cette maréchalerie demeurait une des plus importantes de Paris. Elle se trouvait au carrefour de cinq grandes voies traversières et à proximité des rues où s’accumule l’imposante cavalerie des fardiers, des charrettes, des tombereaux qui roulent dans ce treizième arrondissement si riche en usines, en fabriques, en dépôts de charbon, en entrepôts et en quais de marchandises. Encore qu’elle eût perdu moins que les autres, la maréchalerie Mercœur subissait la crise que l’automobilisme inflige aux commerces et aux industries qui « ressortissent » au cheval. Il lui avait fallu licencier un quart du personnel, elle annonçait une réduction imminente des salaires. D’évidence, elle était maîtresse de l’heure. L’organisation des maréchaux ferrants restait faible, mais, même portée à sa perfection, elle n’eût guère