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gravit la Butte-aux-Cailles, le martèlement des pas rythma la chanson et la foule processionnait autour des palissades en goguenardant avec ivresse :

...............................« Jacquin, Bizard s’étaient promis
...............................D’en fair’ de la chair à profit ! »

Il n’y eut aucun désordre. L’enthousiasme était gai, la révolte se dilatait en risée, les travailleurs pinçaient les petites femmes entraînées dans la foule. Mais le coup était porté : le lendemain, on ne vit que deux vieux hommes aux chantiers ; au bout de la semaine, Jacquin, Bizard et Marneton capitulèrent.


Vint ensuite l’affaire des charpentiers. Elle fut courte et commode. La maison Flammant, de la rue des Tilleuls, quoique jouissant de la marque syndicale, avait engagé deux « renards », artisans libres qui travaillaient au-dessous du tarif. On envoya un délégué qui reçut une réponse évasive et dilatoire. Des charpentiers apportèrent la nouvelle aux Enfants de la Rochelle.

Rougemont prêcha une résistance implacable : la charpente comportait une organisation homogène et tenace ; Flammant n’était pas de force à lui tenir tête ; il fallait, dès le lendemain, le mettre en demeure :

— Dites qu’on ira flamber sa baraque et lui rôtir les fesses ! cria Dutilleul qui assistait à la scène.

Les charpentiers eurent un bon rire, mais seule la parole de François les entraînait. Ils connaissaient l’affaire Boucharlat, ils avaient été casser des vitres avec les typographes et leur confiance dans le meneur était excessive. L’un d’eux, homme au torse rond comme un sac de blé, s’exclama :

— Si vous lui parliez, vous, à ce Flammant ? Je suis sûr qu’y aurait pas besoin de grève.