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valles, signe mystérieux de l’activité des nouveaux êtres.

Le jeune homme avançait dans la solitude, inattentif à sa grandeur funèbre.

Une image brillante dominait les navrements de la catastrophe. Il emportait comme un « double » de la chevelure vermeille ; l’étoile Véga palpitait ainsi qu’une prunelle bleue. L’amour devenait l’essence même de sa vie ; et cette vie était plus intense, plus profonde, prodigieuse. Elle lui révélait, dans sa plénitude, ce monde de beauté qu’il avait pressenti, et pour lequel il valait mieux mourir que de vivre pour le morne idéal des Derniers Hommes. Par intervalles, comme un nom devenu sacré, le nom de celle qu’il avait retirée des décombres venait à sa lèvre :

— Érê !

Dans le farouche silence, le silence du désert éternel, comparable au silence du grand éther où vacillaient les astres, il avançait encore. L’air était immobile autant que les granits ; le temps semblait mort, l’espace figurait un autre espace que celui des hommes, un espace inexorable, glacial, plein de mirages lugubres.

Pourtant, une vie était là, abominable d’être celle qui succéderait à la vie humaine, sournoise, terrifique, inconnaissable. Deux fois, Targ s’arrêta pour voir agir les formes phosphorescentes. La nuit ne les endormait point. Elles se déplaçaient, pour des fins mystérieuses ; la façon dont elles glis-