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orgueil, tout amour de possession actuelle ou posthume ?…

Il va dans ces pensées, au bras d’Hugues. Le grand soir arrive à travers la forêt. La variation des dernières lueurs est fine et douloureuse sur les ramures mi-nues. Le soir est grand et ciselé — grand par l’assoupissement sourd des sous-bois, ciselé par la ténuité des ramuscules et des rameaux. Il se tait, il goûte mélancoliquement la fraternité de son être avec ceux qui souffrirent pour les hommes. L’accord est merveilleux entre l’âme de Daniel et ces minutes. Son état psychique est sans colère, quoique multiple et lucide à l’extrême. Il sent la mort bien proche, il en a l’amère épouvante, et pourtant il ne trouve pas sans douceur d’être là, admiré par le compagnon de sa jeunesse. Et il murmure,