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version tibétaine.

(Traduction de M. Foucaux.)

… Qu’ensuite, ô Bhagavat, cet homme pauvre, parcourant, pour trouver de la nourriture et des vêtements, les villages, les bourgs, les villes, les provinces, les royaumes et les résidences royales, arrive enfin à la ville où habite (son père), cet homme possesseur de beaucoup de richesses, de coris, de trésors et de magasins de grains ; que cependant, ô Bhagavat, le père de cet homme pauvre, possesseur de beaucoup de richesses (etc., comme ci-dessus), qui habile dans cette ville, se rappelle sans cesse ce fils perdu depuis cinquante ans ; qu’il se désole seul en lui-même, sans en rien dire à quelque autre que ce soit, et qu’il réfléchisse ainsi : Je suis âgé, vieux, cassé ; j’ai beaucoup de coris, d’or, de trésors, de grains, de greniers et de maisons, et je n’ai pas (un seul) fils ! Si je venais à mourir, tout cela ne périrait-il pas sans que quelqu’un en jouît ? Qu’il se souvienne ainsi d’un fils à plusieurs reprises : Ah ! si mon fils pouvait jouir de cette masse de richesses, je serais au comble du bonheur !

version chinoise.

… Alors le fils épuisé de fatigues et de misères, après avoir parcouru les villages et traversé les royaumes et les cités, arriva dans la ville où demeurait son père. Celui-ci, plongé dans ses pensées, se disait chaque jour : Mon fils est séparé de moi depuis cinquante ans, et je n’en ai encore parlé à personne. Seulement, en lui-même, son cœur était assailli de pensées, et il renfermait en lui ses regrets et ses chagrins. Il se disait : Je suis vieux et décrépit ; j’ai beaucoup de richesses, d’or, d’argent et de choses précieuses ; mes magasins regorgent, mais je n’ai pas de fils ! Si je me trouvais sur le point de mourir, je n’aurais personne à qui je pourrais les confier et les remettre. C’est pourquoi, avec constance, chaque jour il songeait à son fils, et de nouveau il formait cette pensée : Si (par bonheur) je retrouvais mon fils, je lui abandonnerais mes richesses, et, tranquille et joyeux, je ne me replongerais plus dans la tristesse.