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rable des joies intimes, le frisson des ancêtres autour du foyer… la douce histoire du Nord… Suavement irrésolu, de pente en pente, son esprit roulait à travers le monde, ce monde qui était en lui, évoqué par la magie du vin, à petits tableaux mobiles, saisissants de relief, depuis certaines sorties d’école jusqu’à des messes écoutées dans l’extase, trois prêtres en camail resplendissant, debout devant l’autel. Il revivait sa pure béatitude, son adoration presque douloureuse ; une voie fatale, le besoin du mystère, la soif d’un absolu le menait du Dieu de sa jeunesse au Dieu de son âge mûr, noyait la volupté chaude de la foi dans le sublime de l’espace, le jetait à l’analyse, jusqu’à savourer les joies rétrospectives de la solution d’un problème de géométrie.

Et, à ce poème de l’existence ainsi déroulé, sa complexité un peu effrayante, arrivait tout à coup un défi d’âme orgueilleuse aux éléments, le vertige qui créa Prométhée. Son regard alors, tombant sur Marc, célébrait sa parenté, puis courait au delà, voyait plus qu’une parenté, la conception ivre, confuse, de deux esprits convergeant à travers les âges…

L’alcool travaillait d’autre sorte Marc. Des vouloirs durs se manifestaient, les désirs glacés de la conquête ; la grâce, la douceur restant voulues,