Page:Rosny - Les Profondeurs de Kyamo, 1896.djvu/97

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Je savais toute résistance inutile et propre seulement à aggraver ma situation. Je me laissai entraîner dans la prairie, au milieu des lâches risées des autres, empressés à flatter le jeune monstre. Nous arrivâmes ainsi presque au bord du ruisseau :

— Si on lui administrait un bain ? fit quelqu’un.

— Ça va ! répliqua Davesne… Je vas lui faire goûter l’eau.

Il me tenait toujours aux cheveux, rudement. Je savais qu’il ne manquerait pas de me plonger quelque temps la tête dans le ruisseau, et l’horreur de ce supplice me fit faire un grand effort :

— V’la le veau qui renâcle ! fit Davesne… Attends voir !

Déjà il m’attirait, déjà j’allais toucher l’eau, lorsqu’une jeune voix claire et hardie s’éleva :

— Qu’est-ce que tu fais là ?

Davesne, surpris, s’arrêta de me pousser ; je vis accourir de la maisonnette un petit garçon aux cheveux noirs, à la peau blanche, dont les yeux brillaient de colère. D’un élan, il fut auprès de nous, et, sans une hésitation, il poussa rudement Davesne.

J’éprouvai alors une des impressions les plus intenses et les plus contradictoires de toute ma