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linge, sûr de sa faiblesse, supportait le regard féroce du paysan.

— Tu as touché à mon fils… fais-lui des excuses !

— Je ne lui ai fait aucun mal.

— Fais-lui des excuses !

— Je n’en ferai pas !

La main carrée s’abaitit, la trace s’en marqua instantanément sur le visage de mon père. Au même instant, un couteau brilla.

— Ah ! tu joues du couteau ! fit Davesne, qui avait fait un pas en arrière… On va s’amuser !

Il avait tiré de sa poche une manière de petit poignard enfermé dans une gaine. La lame en était triangulaire, un peu terne, huilée. Il vint avec un cri farouche. Mon père répondit en frappant, mais, son bras repoussé de côté, le petit poignard l’atteignit dans l’épaule gauche. Presque au même instant, le couteau lui était arraché, et Davesne, triomphant, s’écria :

— Eh bien ! rat de fabrique ? Tu en tiens !

Morne, effrayant de désespoir et d’impuissance, mon père s’appuyait au mur de l’église. Je m’étais jeté sur lui, je l’embrassais éperdument, je poussais des cris de fureur et de détresse. Davesne, agitant le couteau conquis et le poignard, dit