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Mon père aimait le jardinage ; moi, déjà d’humeur contemplative, je ne m’ennuyais guère à rêvasser au bord des chemins, à l’orée d’un petit bois qui s’étalait près de notre demeure. Deux ou trois fois par semaine, je me mêlais à quelque jeu d’enfants, sans emporter plus de coups de poing que nature.

Un jour cette existence devint maudite, par la faute d’une famille qui se vint établir dans le village, héritière de quelques arpents d’herbage, et dont les enfants se mêlèrent à nos recréations. L’un d’eux, garçon de douze ans, trapu, agile, aux petits yeux féroces et pénétrants, montra d’emblée des dispositions tyranniques. Dans une contestation au jeu de boules, il trancha en sa faveur un coup que nous jugeâmes tous douteux. L’un de nous ayant protesté un peu vivement, il le fit rouler sur le sol, d’un coup de poing sur le nez, après quoi il nous provoqua d’un air sauvage. L’acte intimida ; les plus audacieux s’entre-regardèrent, indécis. Cependant, excité par tous, Robert Dubourg, incontestablement le plus fort et le plus hardi de la bande, finit par accepter le combat. Hélas ! la rencontre ne fut guère longue. En un moment, le nouveau venu roula notre champion et le mit en bouillie. De ce jour,