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non à l’œil. Cependant Whamô avait levé les bras ; il criait, mais sa voix se perdait dans le vacarme comme un vol d’insectes dans le vent.

Véraguez et Alglave se hâtèrent, puis, immobiles, béants, vertigineux, ils regardèrent le gouffre.

VIII

Le gouffre incommensurable ! D’abord les nappes furieuses, la bataille des eaux resplendissantes comme les cimes d’un Himalaya, retentis-santes comme un troupeau d’orages, avec des grâces de dentelle et des pesanteurs de granit — et toute une pluie pâle qui bondissait au-dessus du Niagara souterrain. Sur quatre assises coulaient ces légions de torrents : quatre marches d’un escalier, dont chacun avait vingt mètres de baut. Et, du haut en bas, le ruissellement, le bondissement, les ruptures, les ilots des rocs, les rencontres obliques, les jeux infinis de la lumière symbolisaient la force violente, la force irrésistible, la fureur inconsciente de l’élément, avec mille délicatesses nuancées.… Et pourtant,