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drissant de gaucherie, Fugère s’était approché assez près pour tirer. Sa balle traversa de part en part le cou de la bête, et presque en même temps il fut à son tour culbuté, secoué comme une guenille, et l’on vit, sous ses vêtements lacérés, sa poitrine pénétrée par les poignards aigus des griffes. Il ne se défendait pas, hypnotisé, se sentant infiniment faible, si faible qu’il se résignait, n’éprouvait pas d’épouvante.

Mais ses amis se précipitèrent, et tout à coup l’animal, criblé de balles, roula sur le savant, l’écrasa de son poids :

— Mort ! s’écria Alglave qui, par précaution, lui envoya une dernière balle dans la tempe.

Rapidement on délivra Fugère. Sa blessure était assez profonde, ayant déchiré un des muscles pectoraux, mais point dangereuse :

— Je l’ai échappé belle ! fit-il en souriant.

Les explorateurs, les hommes d’équipage s’entre-regardèrent, avec l’étonnement de ce drame : leur bateau, jusqu’alors, avait été une sauvegarde absolue contre l’animalité des rives et de la rivière.

— Le quatrième jaguar a disparu ! fit Alglave, tout en procédant à l’examen attentif de la blessure de son ami…