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de l’unique rue. Ils avaient trois enfants, dont une fillette d’environ treize ans, mais qui en paraissait davantage. Elle était beaucoup plus que charmante : elle était effrayante de séduction. Je n’ai jamais revu de si beaux yeux languides, ni le sourire magique de cette bouche. Je ne pensais pourtant pas à mal. Il avait suffi que j’apprisse son âge pour écarter toute pensée équivoque : j’ai toujours eu horreur de tout ce qui est hors nature, et même de ce qui est hors la loi. Eût-elle même paru vingt ans que l’énoncé de sa date de naissance aurait suffi à me rejeter en arrière. Or elle semblait seulement avoir passé la quinzaine.

III

Je ne songeais donc pas à elle. Je pratiquais les modestes vertus de mon emploi et n’avais d’autre distraction que d’herboriser un peu dans la campagne environnante. Elle ne semblait pas davantage songer à moi, et je crois bien qu’en réalité elle était, dans ces premiers temps, parfaitement innocente de ce qui pouvait avoir rapport à l’amour. Tout cela changea en un moment, par la faute d’un malheureux livre. Dieu sait,