Page:Rosny - Les Profondeurs de Kyamo, 1896.djvu/255

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

men, du noble roastbeef de la vieille Angleterre. (Triple salve d’applaudissements.) Gentlemen, Dieu nous a donné les bêtes… »

Je m’étais levé. Je m’avançai vers la table d’honneur d’un pas ferme et je m’écriai :

— Dieu nous a donné les bêtes pour nous servir et non pour être assassinées par nous ! Dieu est venu sur la terre pour nous dire d’être doux et aimants, et l’usage de la viande nous rend lourds, stupides et féroces !… L’usage de la viande nous rend semblables aux bêtes les plus abominables…

J’allais achever ; mais, après un premier mouvement de surprise, une clameur formidable venait de s’élever. Un flot de carnivores se précipita sur moi et m’enleva. En moins d’un instant, j’étais entraîné à la porte, j’étais lancé au dehors avec vigueur, parmi les huées. J’eus le bonheur de tomber dans les bras d’un groupe de végétariens (et, parmi eux, le président de notre club) qui attendaient l’ouverture de la séance contradictoire. Ce fut l’ovation après l’exécution. Je fus porté en triomphe aux mâles accents de la Marseillaise végétarienne :

Contre nous du carnivorisme
L’étendard sanglant est levé.