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charme de sa voix chantante, grisé par sa chevelure, que le vent m’envoyait à la lèvre, je sentis plus de crainte et de ferveur que de gaieté.

— Je « témoignerai », dis-je d’un ton décidé.

II

Cinq jours plus tard, j’étais de retour à Birmingham, je signais le pledge des « végétariens intransigeants ». Je connus les parades dans les parcs, au son des trombones et des grosses caisses, les conférences dans des salles bariolées de légumes, les dîners « joyeux » où des orateurs humoristiques se moquent des carnivores en proie à toutes les horreurs des Rhumatismes, des Sciatiques, des Gouttes, des Étouffements, des Vertiges ; j’eus même deux ou trois fois l’honneur de veiller sur une bannière cramoisie où l’on voyait un végétarien dans le Paradis terrestre, entouré de bêtes qui semblaient l’adorer, tandis qu’un carnivore se noyait dans une mer de sang ; mais je n’arrivais à aucun « témoignage » important. Je n’ai pas d’éloquence, et je me trouvais entouré de gaillards qui parlaient deux heures d’affilée sur tous les légumes de la créa-