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sa mort, arrivée à l’improviste, me laissa sans ressource. Je vécus quelques années avec mon jeune amant ; je crois que je le rendis aussi heureux qu’homme au monde, et je n’eus pas la plus légère infidélité à me reprocher.

Quand la situation devint trop difficile, quand je vis Georges malheureux de lutter contre les siens, qui le voulaient marier, je trouvai moyen de rompre sans trop de douleur pour lui. Le chagrin faillit m’emporter.

Depuis, pauvre et inhabile au travail, j’ai vécu de l’amour, mais j’ai payé mes amants au centuple.

VII

Elle se tut. La brise s’était levée. Le lac frémissait aux rais rougeâtres de la lune montante. Un enchantement de genèse s’épandait sur les eaux. Les cheveux de mon amie flottaient sur mon cou ; son parfum se mêlait à la senteur féconde des vendanges. Alors je sentis que je ne l’avais pas encore aimée. Une excitation charmante faisait battre mon cœur, une gratitude