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l’été de 1893, au cours d’un voyage en Irlande, je m’étais arrêté près de Limerick.

J’y rêvais quelque soir, devant un merveilleux paysage d’eau, lorsqu’on me vint apporter une lettre. J’éprouvai l’une des plus violentes émotions de ma vie en y apprenant la mort de Vrigneuse. C’était ensemble une joie effroyable, un espoir fou, une appréhension pleine d’angoisse. Mais, au tournant de la page, tout ce trouble fondit dans un désespoir sans bornes : on m’y mandait que Vrigneuse avait obtenu de sa femme le serment qu’elle ne se remarierait jamais. L’ami qui m’écrivait était si bien renseigné, et tellement incapable de me donner une nouvelle équivoque, que je ne pus conserver aucun doute. Et mon espoir d’une minute devenait ainsi le plus affreux désespoir, car la femme qui était si fidèle à la promesse faite aux vivants, combien plus devait-elle se sentir liée par le solennel serment prononcé devant un mourant !

IV

Je continuai mon voyage, dans une mélancolie noire. Je ne revins à Paris que vers la mi-no-