Page:Rosny - Les Profondeurs de Kyamo, 1896.djvu/210

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

LA VEUVE


À P. Gallimard.

I

J’avais, comme vous tous, le respect des morts. J’entends ce respect absurde qui veut qu’une promesse soit plus sacrée par devers un mort que par devers un vivant, et qu’il faille venger plus âprement l’insulte faite à l’ami trépassé qu’à l’ami vivant. Une femme m’a corrigé de ce commun travers ; aujourd’hui, la plus légère souffrance infligée à une pauvre créature vivante me fait plus de peine que si l’on outrageait des millions de cadavres, et, plutôt que de fouetter injustement mon chien, je livrerais aux hyènes tous les cimetières de France et de Navarre.

Ce n’est pas, entendons-nous bien, que la mémoire des morts aimés ne me soit infiniment chère ; ce n’est pas, hélas ! que je ne pleure amèrement