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LE RENDEZ-VOUS


À Octave Mirbeau.

I

Elle venait d’arriver, tremblante, à ce premier rendez-vous, et tous deux se regardaient avec le même émoi où il semble qu’on soit à de si vastes distances, où l’on est soudain si étranger l’un à l’autre. Fine et fière, dans sa robe sombre, comme si elle voulait porter le deuil de sa vertu, sa tête émergeait, pâlissante, ses yeux brillaient d’une ardente inquiétude. Lui aussi, quelque ébloui qu’il fût de cette miraculeuse présence, n’était pas sans mélancolie.

Il fit le geste de l’attirer, mais elle demanda, du regard, un répit. Et peu à peu, encore qu’ils gardassent le silence, ils se sentirent plus proches, ils éprouvèrent le vœu complexe, le vœu équivoque de leur amour où il fallait tromper un